En Allemagne : le désir d’enfant se heurte encore au spectre de la "mère corbeau"
Pourquoi les Allemandes ont-elles peu d’enfants ? Alors que le taux de fécondité a stagné depuis 1975 entre 1,24 et 1,54 enfant par femme, une étude de l’ Institut fédéral de recherche démographique montre que les aspects matériels et le manque de crèches ne suffisent pas à expliquer la faiblesse de la natalité. Les mentalités jouent aussi un rôle important.
2. Équilibre famille-carrière
3. Les désavantages financiers pour les mères ouest-allemandes
4. Remontée de la fécondité
Selon l’étude, beaucoup de femmes ont encore peur d’être stigmatisées comme de « mauvaises mères » si elles retournent travailler après leur accouchement. Selon l’étude, 63 % des Allemands de l’Ouest et 36 % des Allemands de l’Est jugent qu’un enfant en bas âge souffre du fait que sa mère travaille. Nombreuses sont les diplômées qui privilégient alors leur carrière.
Sur le territoire de l’ancienne RDA, le spectre de la Rabenmutter (« mère corbeau ») est nettement moins présent qu’à l’Ouest. En effet, le travail des femmes est plus habituel et les infrastructures de garde plus développées. Par contre, les facteurs économiques jouent un rôle plus important qu’à l’Ouest sur la taille de la famille.
De manière générale, le désir d’enfant semble plutôt moins ancré qu’ailleurs. Chez les 18-50 ans sans enfant, moins d’un sondé sur deux (45 %) pense ainsi qu’il serait plus heureux s’il avait un enfant dans les trois années à venir. De plus, l’Allemagne est le pays où les femmes sans enfant sont les plus nombreuses. La presse allemande rêve d’une situation à la française où les enfants font partie de la vie et arrivent quand ils arrivent. En Allemagne, les couples envisagent la fondation d’une famille comme une étape à part entière, repoussant longtemps l’échéance tant que les conditions ne semblent pas optimales, commente-t-elle.
Même trois décennies après la réunification, les mères d'Allemagne de l'Est vont travailler plus souvent et plus tôt après la naissance de leur enfant que les mères d'Allemagne de l'Ouest. C'est le résultat d'une étude de l'Institute for Employment Research (IAB). Mais ce qui est encore plus intéressant, c'est que les mères ouest-allemandes "apprennent" souvent de leurs collègues est-allemandes lorsqu'elles travaillent ensemble et suivent le modèle est-allemand d'une mère qui travaille.
Les différences dans le comportement des mères en matière d'emploi entre l'Est et l'Ouest sont encore importantes, selon l'étude. Ce n'est que pendant la première année suivant la naissance de l'enfant que les femmes d'Allemagne de l'Est et de l'Ouest se comportent de la même manière et restent à la maison. Après cela, cependant, les mères est-allemandes retournent souvent au travail, comme c'était la norme en RDA, où les femmes se voyaient accorder une année bébé entièrement rémunérée. Après deux ans, la majorité des mères est-allemandes ont déjà retrouvé un emploi régulier. En Allemagne de l'Ouest, en revanche, de nombreuses mères ne retournent pas au travail avant la fin du congé parental, après trois ans.
Le ministère de la Famille, lui, en appelle à continuer les efforts visant à faciliter la conciliation d’une vie professionnelle et d’une vie familiale. Il y a œuvré activement ces dernières années, notamment par la mise en place d’un salaire parental et la réalisation d’un vaste programme de construction de crèches. Il appelle désormais les entreprises à créer un climat et des conditions de travail qui facilitent la vie des parents. En Allemagne, 88 % des hommes et 78 % des femmes considèrent, en effet, qu’il est difficile de mener de front carrière et vie de famille.
Cependant, alors qu'en 1991, la moitié des femmes de l'Ouest travaillaient, ce chiffre est aujourd'hui légèrement inférieur à 72 pour cent, ce qui est similaire à celui des nouveaux Länder. L'Est était le modèle, l'Ouest a suivi. À l'échelle nationale, les femmes gagnent plus que les hommes dans 23 des 401 Kreise qui sont tous situés à l'Est.
La différence de comportement en matière de retour au travail entre les femmes est-allemandes et ouest-allemandes a des implications monétaires à long terme : Sept ans après l'accouchement, les mères est-allemandes gagnent environ 70 % de leur revenu avant la naissance, ce qui les place à peu près au même niveau que les mères américaines et suédoises - les mères ouest-allemandes, en revanche, gagnent un peu moins de 45 % de leur revenu avant la naissance.
L'Allemagne a connu depuis des dizaines d'année un taux de fécondité très bas. Cependant la période 2016 - 2023 confirme une croissance de la fécondité observée depuis 2014, le pays semblant avoir enclenché une dynamique ascendante. Ce renouveau de natalité serait influencé par les mères étrangères qui avaient, en 2016, une fécondité de 2,28 enfants par femme, contre 1,46 pour les mères de nationalité allemande.
Il n'y a plus de différences significatives dans le nombre de nouveau-nés. En 2023, le taux de natalité à l'échelle nationale était de 1,54 enfants. Dans l'ancienne République fédérale, le taux pendant des décennies était d'environ 1,4. En RDA, il est passé à 1,94 en 1980, après la chute du mur de Berlin, le taux de natalité est-allemand a chuté pour atteindre la valeur historiquement unique d'environ 0,8.
Autre problème qui reste d'actualité: Il y a encore beaucoup plus d'hommes que de femmes aux postes de direction en Allemagne. Selon la fondation Albright, plus de 90 % des membres allemands du conseil d'administration étaient des hommes en 2019. Seuls 9,3 % des membres des conseils de surveillance étaient des femmes - moins que dans presque tous les autres pays industrialisés occidentaux.
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Johanna